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29 Le Fantastique : un thème apprécié par les Romantiques

Parce que l'Art est justement un domaine où la création nécessite une part d'imagination importante, celui-ci est le lieu privilégié de toutes les fantaisies surnaturelles relevant de l'impossible et de l'irréalisme.

La légende de Saint-Romain et la Gargouille

Il y avait, dans les marécages qui bordaient la Seine, un épouvantable monstre qui dévastait les environs et que les rouennais terrorisés avaient appelé La Gargouille. Lorsque Saint Romain décida d'affronter la bête, la seule personne qui osa l'accompagner fut un condamné à mort. Le miracle se produisit : le monstre fut dompté par l'évêque et par sa croix, tenu en laisse avec une simple étole et ramené à Rouen par le condamné, qui par la même occasion venait de sauver sa vie. Quant à la Gargouille, on la brûla en place publique. Ce miracle donna lieu au « privilège de saint Romain » qui sauvait la vie d'un condamné tous les ans. Ce privilège disparut avec les autres la nuit du 4 août 1789...

Source : bibliothèque de Rouen

Rituale ad usum ecclesiae Rothomagensis (XVe) - Archevêché de Rouen

De ce fait, on trouve la thématique fantastique présente dans un corpus très ancien, notamment au Moyen-âge : on citera la légende de la gargouille de Rouen (cf : ci-dessus) et l'apparition des gargouilles aux faciès monstrueux avec l'avènement de l'architecture gothique.

Gargouilles de Notre Dame de Paris (XIIIe)

Outre le rôle qu'avaient les gargouilles d'éloigner des murs l'écoulement des eaux de pluie, celles-ci devaient, par leur aspect monstrueux, maintenir les forces du mal à l'extérieur du temple sacré. Elles étaient donc les gardiennes symboliques du bien.

Dans le domaine pictural, on pourra aussi évoquer un peu plus tard le fameux triptyque du Jardin des Délices de Jérôme Bosch.

Cette thématique vise alors à donner un visage au Mal, l'ennemi juré de la religion, l'entité de toutes les peurs humaines.

Attirés par cette époque, les artistes romantiques, lettrés en tête, vont réinvestir le terrain du fantastique et en faire l'une des thématiques caractéristiques de l'époque. Mais cette fois, le fantastique est au service d'un art profane.

Il est difficile de faire le tour des exemples tant ceux-ci sont nombreux, mais on pourra par exemple citer les Contes fantastiques d'Edgar Allan Poe, la Peau de chagrin d'Honoré de Balzac ou encore les nouvelles et les poèmes de Théophile Gautier.

"La chimère" (1837) extrait de la Comédie de la Mort

de Théophile Gautier

Une jeune chimère, aux lèvres de ma coupe,

Dans l'orgie, a donné le baiser le plus doux

Elle avait les yeux verts, et jusque sur sa croupe

Ondoyait en torrent l'or de ses cheveux roux.

Des ailes d'épervier tremblaient à son épaule

La voyant s'envoler je sautai sur ses reins ;

Et faisant jusqu'à moi ployer sou cou de saule,

J'enfonçai comme un peigne une main dans ses crins.

Elle se démenait, hurlante et furieuse,

Mais en vain. Je broyais ses flancs dans mes genoux ;

Alors elle me dit d'une voix gracieuse,

Plus claire que l'argent : Maître, où donc allons-nous ?

Par-delà le soleil et par-delà l'espace,

Où Dieu n'arriverait qu'après l'éternité ;

Mais avant d'être au but ton aile sera lasse :

Car je veux voir mon rêve en sa réalité.

Du côté des peintres, on pourra penser aux toiles de Johann Heinrich Füssli, Francisco Goya ou Félicien Rops sans oublier un peu plus tard dans le domaine de la sculpture la fameuse Porte des Enfers d'Auguste Rodin.

Le Cauchemar (1781) de J. H. Füssli - Dimensions (1,02 m x 1,27 m)
Saturne dévorant un de ses fils (1819-1823) de F. Goya
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